Le cannabis médical, une réalité à Maurice

Après avoir étudié les recommandations du comité technique sur l’usage du cannabis médical publié en janvier 2022, le Steering Committee du ministère de la Santé et du Bien-être a donné son accord pour l’introduction du cannabis thérapeutique à Maurice. Des essais démarreront à l’hôpital Victoria, Candos. Des spécialistes devront au préalable suivre une formation.  

 

C’est quoi, le cannabis médical ? 

En décembre 2020, la Commission des Nations unies sur les stupéfiants a reconnu la valeur thérapeutique du cannabis en l’enlevant du Tableau IV de la Convention unique sur les stupéfiants de 1961. Une convention réservée aux opiacés mortels et addictifs spécifiques et n’ayant que peu, voire aucun effet thérapeutique. Mais qu’est-ce que le cannabis médical ? 

Le cannabis médical, aussi appelé cannabis thérapeutique, est l’utilisation de cette substance pour soulager des symptômes ou soigner une maladie particulière. Dans ce cas, les effets psychoactifs du cannabis ne sont pas recherchés. 

Le cannabis est composé de cannabinoïdes. Ces composantes chimiques, dont il existe plusieurs molécules, produisent certaines réactions lorsque consommées. Les cannabinoïdes impliqués sont le tétrahydrocannabinol (THC) et le cannabidiol (CBD). Ces produits se présentent sous diverses formes, qui vont déterminer le mode d’administration (inhalation, vaporisation, voie orale et application locale). Les produits thérapeutiques à base de cannabinoïdes, qu’ils aient ou non une licence pharmaceutique, sont considérés comme du cannabis médical. À Maurice, le gouvernement prévoit de dispenser des produits importés approuvés par l’agence américaine des produits alimentaires et médicamenteux (Food and Drug Administration, FDA), la European Medicines Agency, Health Canada, la Therapeutic Goods Agency of Australia, and la South African Health Products Regulatory Agency dans un premier temps. Les produits ayant une licence FDA ont fait leur preuve durant des essais contrôlés et figurent largement dans la littérature sur l’efficacité de ce type de traitement. 

Les points forts des recommandations du comité technique sur le cannabis médical : 

  1. Les patient·e·s auront accès aux traitements sous diverses formes, gratuitement, dans les hôpitaux. 

  1. Le cannabis médical sera prescrit aux patient·e·s souffrant d’un cancer et qui nécessitent une chimiothérapie, d’épilepsie, de douleur neuropathique chronique ne répondant pas aux traitements conventionnels et de sclérose en plaques, entre autres. 

  1. Une formation sera mise en place pour le corps médical ainsi que les soignant·e·s, pharmacien·ne·s et autres personnels de santé impliqué·e·s dans la mise en œuvre de cette phase pilote. Une licence permettant la prescription de cannabis médical sera octroyée aux médecins ayant suivi la formation.  

  1. Un panel de spécialistes sera mis en place au niveau des hôpitaux régionaux pour évaluer l’éligibilité des patient·e·s.  

  1. Les patient·e·s traité·e·s dans le privé pourront accéder au traitement à travers un référencement vers le panel d’éligibilité. Le médicament sera toutefois payant. 

  2. La Dangerous Drugs Act (DDA) sera amendée pour exclure les produits de cannabis médical. 

Ce qu’en pense PILS 

Le cannabis médical est autorisé dans une trentaine de pays et son introduction à Maurice est un pas en avant, que ce soit au niveau médical mais aussi économique. En effet, cette phase pilote pourrait laisser place à une mise à l’échelle avec une panoplie de produits adéquats pour davantage de patient·e·s. La gratuité des traitements en garantira l’accessibilité à tou·te·s alors qu’une formation du personnel médical permettra de déstigmatiser ce type de traitement et de renforcer en capacité les médecins sur la prescription de produits à base de cannabis pour les patient·e·s éligibles.  

Cependant, il est nécessaire d’étoffer la panoplie de produits disponibles après la phase pilote ainsi que les pathologies éligibles en investissant dans la recherche au niveau local.  

D’un point de vue financier, l’industrie du cannabis est un marché très prometteur, d’autant que les politiques publiques par rapport à la légalisation du cannabis (thérapeutique et à usage récréatif) évolue dans le monde. Ainsi, le développement d’une industrie locale pourrait être bénéfique à notre économie. Nous constatons que plusieurs recommandations de PILS ont été prises en compte par le comité technique. Cependant, nous maintenons notre vigilance quant à la mise en œuvre de cette phase pilote. Une campagne de communication solide pour informer la population sur le cannabis médical afin de déstigmatiser son utilisation et encourager les personnes concernées à aller vers ce traitement pour assurer le succès de cette première étape est nécessaire.